jeudi 3 avril 2014

Tableaux de Palerme


Une ruelle de Palerme


    A cette heure entre nonnes et vêpres où le soleil bat la terre, aucune agitation n'est de bon augure. 
Le pelage des chiens errants s'engorge de particules. De cette poussière qui forme des spectres garants du couvre-feu. Les papiers sales furètent en éclaireurs aux lézardes des pierres fumées qui gardent les bâtisses. 
    
    A cet étage tout est forgé par la brûlure, du macadam fondu aux bennes à ordures calcinées, aux mégots disséminés. Le noir remonte, s'engrisaille, puis se tâche aux balcons de vifs coloris synthétiques ou pendent les lessives. Et, enfin, tout là-haut : une ouverture. A peine une lucarne pâle et malade, un voile qui sèche, un trait de ciel pur. 

   Un peintre aurait ravivé les joues d'un tel visage. Justement, dans la mare où les rigoles perdent le chemin de la mer, une teinte s'y aventure. Depuis le temps qu'elle se prélasse, une eau de sang a marqué les bordures de ronds succéssifs gage de son assèchement. 

   Celui sûrement d'une créature de ces bas-fonds, de cette mouette las-bas dont il ne reste que deux ailes collés comme les paupières d'un enfant qu'on tire du sommeil. Sur le dos de ce dos, d'autres plumes, le bec puissant et acharné d'un goéland à peine plus grand qui se contente en pâture des tristes restes d'un semblable. 

   Mais la reine en ces lieux est l'adolescence vibrante, perturbée, de cet autre oiseau qui vole, de ce rapace plus carnacié ; sans maître, loin de la fenêtre, trop loin du grand air, trop loin de son grand-père.

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 Le jardin botanique 

Silence.
 Un ciel bleu clair s'étend, fendu par l'oiseau au plumage vert qui plane, dont la queue se déploie comme une main. 
J'aimerais peindre chaque arbre, chaque plante jusqu'à l'herbe indésirée qui se proclame aristocrate. 
On ne pourrait mieux décrire telles palmes arrondies, telle sensualité épineuse, telle luxuriance. 
Résonne quelques coups sournois et irréguliers de graines et fleurs impatiente de cavaler loin de l'oiseau  vert, au ventre jaune, au reflets multiples, qui chasse en élégance. 
Dans ce temple floral la couleur se mange, c'est le sucre et la viande tendre d'une société close.
Lui niche dans le grand arbre sec et blanc au cheveux roux, dans un noeud à mi-sommet.
Un rat me garde à l'oeil dans une reinure et un chat me dédaigne sur les graviers massants. 
Les lézards s'éclipsent à mon approche dans un bruissement de feuilles mortes.
 Et là, magistrale !
 Immérgées et en surface, les tortues enseignent à qui les observent leur sagesse du temps qui passe.
 Au tempo qu'elles connaissent depuis des âges entiers, elles se meuvent lourdement dans le seul but de puiser à leur peau de pierre le meilleur du rayonnement solaire.
Sur un bloc de marbre ou se reflète les losanges de l'étang, je me fait l'élève de leur enseignement. 



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